De Berlin à Jérusalem, une dialectique de l'exil

  Cycle : la Paracha selon le Mechekh 'Hokhma*  

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De Jérusalem à Berlin : Une dialectique de l’exil

 

A ceux qui voulaient « voir en Berlin leur Jérusalem », Rav Méïr Sim’ha HaCohen de Dvinsk promettait, dans son célèbre commentaire sur Parachat Be’houkotaï, « une tempête à la violence redoublée qui les jetterait dans un nouvel exil lointain ». L’auteur du Mechekh ‘Hokhma a quitté le monde durant l’été 1926, laissant celui-ci à sa terrible histoire. La « tempête » n’a pas fait que bousculer par la déferlante le peuple juif d’Europe meurtri par ses multiples fractures idéologiques et identitaires. Elle a emporté dans les cendres jusqu’au pronostic lui-même.

Demeure cependant ce texte qui dérange. Une grille de lecture de l’Histoire en apparence verrouillée dont le déterminant négatif, celui qui appelle périodiquement toutes les catastrophes, serait la tendance à l’innovation religieuse, le ‘Hidouch. L’héritage traditionnel revisité par les jeunes loups, tout le peuple redeviendrait agneau, remis à nu, ailleurs, par les affres de l’exil. Fallait-il que ce trauma mainte fois ravivé au regard de l’Histoire jetât à jamais la suspicion voire l’anathème sur toute velléité de ‘Hidouch ? Rien ne commande de s’en tenir à cette caricature sauf à abdiquer devant le décryptage d’un grand texte, complexe, subtil.

La réflexion du Mekhekh ‘Hokhma porte sur le verset de chute prenant le contrepied d’une terrifiante litanie de malédictions : « Et pourtant, même alors, quand ils se trouveront relégués dans le pays de leurs ennemis, je ne les aurai ni dédaignés ni repoussés au point de les anéantir, de dissoudre mon alliance avec eux ; car je suis l'Éternel, leur Dieu ! » (Lévitique XXVI,44)

Dédain, rejet, anéantissement et reniement de l’Alliance évités de justesse, contenus in extremis par la Providence : tout semble relever d’une intentionnalité et vise à démontrer que « l’Eternel » est bien « leur Dieu », seul capable d’une telle intention et d’une telle dextérité dans l’administration du malheur. Nous serait-il donné de comprendre comment et pourquoi ? Le commentaire relève avec l’humilité et la réserve requises ce défi. Cela suppose un découpage de l’Histoire, une dialectique de l’exil et une élaboration critique des notions de ‘Hidouch et de citoyenneté.

 

Un découpage de l’histoire

Tout commence par une double finalité : offrir à l’ère messianique, au terme des siècles, un peuple de l’Alliance, fidèle à lui-même en tant que descendant des patriarches et une Torah transmise non moins fidèlement, exempte des scories et des trahisons, conservée dans sa pureté et dans son authenticité. Tout le reste, dès lors que ce peuple est au contact d’autres que lui, n’est que stratégie en réponse à l’obsédante question : comment contenir les risques d’assimilation et d’altération de l’héritage ?

C’est déjà la préoccupation des « pères fondateurs » de la nation juive. A l’instar d’Abraham érigeant la précaution en principe, Jacob, au seuil de l’Egypte, consacre en sus les codes spécifiques des enfants d’Israël à travers le nom, la langue et l’habit. En intimant l’ordre testamentaire d’être porté en terre de Canaan, racine digne d’elle, il ajoute à la distinction le sentiment d’étrangeté. Joseph et ses frères feront promettre que l’on agisse de même avec leurs restes au terme de ce séjour définitivement perçu comme un exil. Les égyptiens déverseront leur mépris envers cette famille-nation sans lien organique avec eux, telle « des ronces au milieu des plantes. » « Distincts » et « étrangers » confirmera la Haggada.

Sur la période des deux Temples, la capacité prophétique - Nevouah - et, pour le deuxième, l’inspiration mystique - Roua’h haKodech - couplés à l’infaillibilité des institutions en charge de la loi, de la justice et de la transmission, sont autant de garanties d’un bon exercice du ‘Hidouch et de l’appréciation des situations nouvelles. En outre, l’œuvre d’Ezra et de la grande Assemblée, notamment les fameux dix-huit décrets visant à régenter les rapports des juifs et des idolâtres, court tant que le Messie n’aura pas aboli « l’asservissement par les nations », n’en déplaise au prophète Elie qui, eschatologie oblige, devra patienter pour voir établir la caducité de ces décrets. L’héritage et le peuple sont, là encore, maintenus dans leur « authenticité », du moins jusqu’au grand exil…La dialectique de l’exil

En l’absence des garanties d’antan c’est la Providence qui, à partir de la destruction du second Temple, se charge de tout désormais. Comment ? A l’image de La Dialectique du Maître et de l’Esclave d’Hegel, le Mechekh ‘Hokhma décrit une implacable dialectique fondée sur sa connaissance de l’Histoire et autres témoignages d’auteurs illustres.

A la « tempête » des persécutions laissant un peuple juif exsangue en quête d’un lointain refuge succède une période d’un ou deux siècles de calme relatif. Pour survire, les juifs se rassemblent, se solidarisent à nouveaux, refont peuple. Comme on quitte un habit, ils abandonnent leur ancienne langue d’adoption pour revenir à la langue sacrée. C’est le temps de leur Renaissance : un esprit divin souffle sur ces cœurs éprouvés, suscitant un retour à une pratique délaissée et à une étude ruinée par les malheurs. On renoue avec l’espérance messianique et le message des prophètes. Progressivement, l’art de l’étude poussé au sommet à la faveur d’efforts mutualisés laisse entrevoir l’apogée de leur sagesse. Cette apogée, pourtant, porte déjà la marque du déclin.

En effet, si l’Histoire universelle de la connaissance obéit, selon le Mechekh ‘Hokhma, au schéma de la disqualification par les nouvelles générations du savoir de ceux qui les ont précédées, c’est moins par l’expérimentation et l’effet d’accumulation de ce savoir que par le désir d’exister à tout prix à la grâce d’une rupture. Il est dans l’ordre des choses et dans la psychologie humaine de vouloir réinventer son temps, innover, découvrir, proposer l’interprétation inédite des phénomènes comme des textes. Ainsi, toute jeunesse a vocation à se dresser si elle ne veut pas mourir de frustration.

Mais ce qui vaut pour la connaissance universelle, fruit de la raison humaine, ne vaut pas pour l’héritage de la Torah, fruit de la révélation. D’autant que les garde-fous - prophétie et institutions - qui, à l’époque des Temples, permettaient aux Sages d’innover forts de leurs outils d’exégèses, ne sont plus. D’où cette dimension tragique de la fracture générationnelle autour du savoir : que va devenir ce besoin existentiel d’innover devant l’interdit structurel d’innover ?

C’est là que la dialectique de l’exil se poursuit dans sa phase régressive. Lors que l’étude et l’art du Pilpoul – la bien nommée dialectique talmudique – atteignent des sommets d’excellence, la nouvelle génération se cherche un objet révolutionnaire, attend de lui qu’il lui permette de sublimer son immense frustration. Si la capacité de l’approfondissent ne lui est pas donnée, elle se tourne, pour nourrir un propos novateur, vers des doctrines « fallacieuses », des horizons intellectuels « étrangers », des cultures, des langues « étrangères ». Les crédos sont contestés, la Critique Biblique jette la suspicion sur la sacralité des textes pour toute une jeunesse gagnée par l’hérésie. Pour l’assumer, il lui faudra oublier son histoire, sa misère d’antan, dénoncer l’imposture des anciens, se proclamer fils d’une nouvelle terre promise, faire de « Berlin » sa « Jérusalem ».

Puis, se lève une « tempête » plus terrible encore. Retour au premier acte de la dialectique de l’exil, perpétuellement jusqu’au terme messianique…

 

La critique du ‘Hidouch et de la citoyenneté

Le sens de cette dialectique est inscrit dans sa finalité, double finalité comme évoqué : maintenir le peuple et sa Torah dans leur pureté. Pureté menacée compte tenu de la quiétude des jours heureux en pays d’accueil et du rejet par la génération qui n’a souffert ni lutté du « Grand Ennui » cher à Georges Steiner. A ceci près que le désir d’assimilation découle, dans la description du Mechekh ‘Hokhma, de la lassitude des jeunes esprits interdits de ‘Hidouch

Au-delà d’une pensée située – l’opposition frontale à la Réfrome -, au-délà de la radicalité de cette pensée - occulter que la surabondance des savoirs est porteuse de non-savoir, conférer à l’histoire un caractère répétitif ou concevoir un futur déductible n’est pas plus aisé que de nier l’enrichissement mutuel des sages, des théologiens et des philosophes perceptibles chez tant d’auteurs trônant dans la bibliothèque juive - deux notions se trouvent ainsi en souffrance dans le discours de Rav Meïr Sim’ha haCohen de Dvinsk : le ’Hidouch, comme capacité de renouvellement, et la citoyenneté, comme mode d’appartenance à une nation « d’accueil ». La facilité serait de ne pas voir que, derrière ces anathèmes, entre le lignes, se profilent une pratique saine du ‘Hidouch, tout comme une juste appartenance patriotique.

D’une part, la citoyenneté entendue comme appartenance à un ordre politique et social ne contrevient en rien, dans son principe et sous couvert de compatibilité avec les commandements, à l’idée de conserver intactes sa Mémoire, ses valeurs spirituelles, son identité essentielle, sa fidélité aux fameuses « racines ». Au fond, cette citoyenneté-là ne se joue pas sur le terrain de l’exclusivité et ne se nourrit pas de ce qui compose l’identité juive.

D’autre part, l’art du ‘Hidouch « en exil » auquel il est tragiquement impossible de renoncer, trouve peut-être sa juste mesure dans un sens aigue de la perception de soi et du monde, rapport dynamique qui fait voir à chaque instant une nouvelle combinaison, un nouveau trait du texte infini. A chaque instant, nous sommes autres, animés par une force créatrice nouvelle. Connectés au monde, nous sommes révolutionnaires à perpétuité. On pourra sans doute lire ainsi l’appendice du commentaire du Mechekh ‘Hokhma relisant la métaphore talmudique brodée sur un verset des Psaumes au début du traité Pessa’him. « Telle la lumière du matin dans ce monde-ci, ainsi brillera la lumière pour les justes dans l’autre monde » : les justes en perpétuelle découverte-émotion-élévation, lumineuse dialectique digne de l’aube sautillante, de ces matins de l’ici-bas où un autre monde se fait jour à chaque seconde.

Une dernière interrogation demeure, et non des moindres. Ici et maintenant, où nous situons-nous selon le « récit » du Mechekh ‘Hokhma : dans l’imminence d’un déracinement salutaire ou à l’aube d’un siècle de renouveau ? Berlin prise naguère pour Jérusalem, Jérusalem prise demain pour Berlin ?

 

Rabbin Nissim Sultan

 

*Rav Méïr Sim’ha haCohen de Dvinsk. 1843-1926

Texte original:

משך חכמה ויקרא פרק כו פסוק מד
(מד) ואף גם זאת בהיותם בארץ איביהם לא מאסתים ולא געלתים לכלתם להפר בריתי אתם כי אני ה' א - לקיהם. הענין הוא, שנתבונן קצת בדרכי ההשגחה העליונה קצת מה שיוכל להבין. וזה, כי כאשר גזרה החכמה העליונה אשר ישראל יתנודדו בארצות, שנים רבות מאוד מאוד, עד זמן אשר חקקה המטרה הא - לקית, אשר לבא לפומא לא גליא, חשבה אופנים ותחבולות אשר ישראל יתקיימו לגוי ולא יתבוללו בעמים. והעירה על זה גדולי האומה לעשות בזה גדרים סייגים, אשר האומה תתקיים בשאון גלי הים ולא תטבע במצולות הסער השוטף ברוח אמיץ וכביר. והנה הראשון המורה דרך ומלמד ראשי האומה הוא אבינו הזקן יעקב, אשר ראה את אשר יקרה אותנו באחרית הימים, חשב אשר אם יהיה שבעים איש בגוי חזק ואמיץ כמצרים מלפנים, הלא יתבוללו ויתבטלו אחד ברבבות רבבה. חשב תחבולה ועצה, אשר בניו יהיו מצויינים שם בבגדיהם ובשמותם. ולכן היו ישראל לגוי בפני עצמו. ואם היה יעקב, אבי כל שבטי ישראל, קבור שם, הלא היו מתיאשים מארץ כנען והיו משתקעים במצרים ומחשיבים אותה לארץ מולדתם, והיה בטל יעוד האלקי עליהם, כי לא יהיה זרע אברהם רק חלק אחד מעם מצרים. לכן צוה בכל עוז לקבור אותו בארץ כנען (בראשית מז, כט - לא), וידעון כי אבות האומה ויחוסה הוא בארץ כנען [שכאשר ידעו מעלתו, היו משתוקקים לקוברו וחשבוהו כאשר הוא למזבח, כמו שאמרו מה מזבח מכפר וכו'. ועיין במדרש שלא יעשו אותו עבודה זרה, יעויין שם].
ובזה נקבע בנפש בניו קישור טבעי להשתוקק אל ארץ אבותיהם ולחשוב עצמם כגרים. וזה (דברים כו, ה) "ויגר שם" - מלמד שלא ירד יעקב אבינו להשתקע אלא לגור שם (ספרי שם). פירוש, מלמד לדורות בכל גלות וגלות ההנהגה, שידעון שלא ירדו להשתקע רק לגור עד בוא קץ הימין, ויהיו נחשבים בעיני עצמם לא כאזרחים. וכן צוה יוסף (בראשית נ, כה) "פקד יפקד (א - להים אתכם, והעליתם את עצמותי מזה"). וכן כל השבטים, שבזה הניחו שורש גדול בלבב ישראל. ולכן (שמות א, יב) "ויקוצו מפני בני ישראל" - שהיו נחשבים בעיניהם כקוצים (סוטה יא, א) - שכמו שהקוץ אינו נסבך ועושה שרשים בשאר נטעים ואילנות, כן היו נחשבים ישראל, שלא דימו את עצמם למצרים והיו נפרדים בתכונותיהם ובהרגשתם, עד כי היו בעיני המצרי כקוץ. ומזה למדו גדולי האומה - ובראשם עזרא ואנשי כנסת הגדולה - שגדרו וסייגו האומה בי"ח דבר, להיבדל מן הגויים בכל דרכיהם, שידעו ישראל כי הוא אכסנאי וגר בארץ נכריה, והוא כשתילי זיתים שאינו מתערב עם הרכבה אחרת. ולכן אמרו בירושלמי שאפילו אליהו אינו יכול לבטל. פירוש, כל זמן שלא בא הגואל ויפסק שעבוד מלכיות, אפילו בא המבשר ואמר כי תיכף יבא, לא יבטלו, שהם הם הדברים המקיימים להאומה בגולה, ומזכירים אותו שהוא ישראל והוא בארץ לא לו.
והנה מעת היות ישראל בגויים, ברבות השנים, אשר לא האמינו כל יושבי תבל כי יתקיימו באופן נפלא אשר לא ישער מחשבת אדם משכיל, היודע קורות הימים והמצולות אשר שטפו באלפי שנים על עם המעט והרפה כח וחדל אונים [אשר זה לבד גם כן מופת נפלא וגדול על קיום האומה למטרה נשגבה א - לקית, אשר נתנבאו עליה הקדמונים]. הנה דרך ההשגחה כי ינוחו משך שנים קרוב למאה או מאתיים. ואחר זה יקום רוח סערה, ויפוץ המון גליו, וכלה יבלה יהרוס ישטוף לא יחמול, עד כי נפזרים בדודים, ירוצו יברחו למקום רחוק, ושם יתאחדו, יהיו לגוי, יוגדל תורתם, חכמתם יעשו חיל, עד כי ישכח היותו גר בארץ נכריה, יחשוב כי זה מקום מחצבתו, בל יצפה לישועת ה' הרוחניות בזמן המיועד. שם יבא רוח סערה עוד יותר חזק, יזכיר אותו בקול סואן ברעש - "יהודי אתה ומי שמך לאיש, לך לך אל ארץ אשר לא ידעת"!
ככה יחליף מצב הישראלי וקיומו בעמים, כאשר עין המשכיל יראה בספר דברי הימים. וזה לשתי סיבות: לקיום הדת האמיתי וטהרתו, ולקיום האומה. כי כאשר ינוח ישראל בעמים יפריח ויגדל תורתו ופלפולו, ובניו יעשו חיל, יתגדרו נגד אבותיהם, כי ככה חפץ האדם אשר האחרון יחדש יוסיף אומץ מה שהיה נעלם מדור הישן. וזה בחכמות האנושית, אשר מקורן מחצבת שכל האנושי והנסיון, בזה יתגדרו האחרונים יוסיפו אומץ, כאשר עינינו רואות בכל דור. לא כן הדת הא - לוקי הניתן מן השמים, ומקורו לא על ארץ חוצב. הלא אם היה בארץ ישראל מלפנים, הלא היה להם להתגדר בתיקון האומה כל אחד לפי דורו - בית דין הגדול היה יכול לבטל את דברי בית דין הקודם. ומה שנדרש ב - י"ג מידות, אף בית דין קטן היה יכול להראות אופן הישר בעיניהם. וראה ביום הכיפורים לענין שעורים מה שאמרו, שבדיני נפשות הוא כל אחד כפי הסכם חכמי דורו איזה שעור קצוב, יעויין שם. ומלבד זה היה תמיד הופעה א - לקית רוחנית, מלבד מקדש ראשון, ששרה עליהם הרוח, והיו נביאים ובני נביאים, ואסיפת בעלי חכמה והטהרה המוכשרים לזה, כאשר כתב הרמב"ם בהלכות יסודי התורה, והיה אורים ותומים. אף במקדש שני אמרו ששם שואבים רוח הקודש, והיה גלוי אור א - לקי תמיד חופף, אשר לא ידעו הדור מלפנים. ומההנהגה של האומה בענינים הזמניים, כאשר היה המשפט מסור להם לדון להוראת שעה, שהשעה היה צריכה לכך.
לא כן בגולה, שנתמעט הקיבוץ והאסיפה בלימוד התורה, שמטעם זה אין רשות לשום בית דין לחדש דבר, כמו שכתב הרמב"ם בהקדמתו לספר משנה תורה, ואין שום חוזה ונביא, ומחיצה של ברזל מפסקת בין ישראל לאביהם שבשמים. כך היה דרכה של האומה, שכאשר יכנסו לארץ נכריה, יהיו אינם בני תורה, כאשר נדלדלו מן הצרות והגזירות והגירוש, ואח"כ יתעורר בהם רוח א - לקי השואף בם להשיבם למקור חוצבו מחצבת קדשם, ילמדו, ירביצו תורה, יעשו נפלאות, עד כי יעמוד קרן התורה על רומו ושיאו. הלא אין ביד הדור להוסיף מה, להתגדר נגד אבותם! מה יעשה חפץ האדם העשוי להתגדר ולחדש? יבקר ברעיון כוזב את אשר הנחילו אבותינו, ישער חדשות בשכוח מה היה לאומתו בהתנודדו בים התלאות, ויהיה מה. עוד מעט ישוב לאמר "שקר נחלו אבותינו", והישראלי בכלל ישכח מחצבתו ויחשב לאזרח רענן. יעזוב לימודי דתו, ללמוד לשונות לא לו, יליף מקלקלתא ולא יליף מתקנא, יחשוב כי ברלין היא ירושלים, וכמקולקלים שבהם עשיתם כמתוקנים לא עשיתם. "ואל תשמח ישראל אל גיל כעמים" (הושע ט, א).
אז יבוא רוח סועה וסער, יעקור אותו מגזעו יניחהו לגוי מרחוק אשר לא למד לשונו, ידע כי הוא גר, לשונו שפת קדשנו, ולשונות זרים כלבוש יחלוף, ומחצבתו הוא גזע ישראל, ותנחומיו ניחומי נביאי ה', אשר ניבאו על גזע ישי באחרית הימים. ובטלטולו ישכח תורתו, עומקה ופלפולה, ושם ינוח מעט, יתעורר ברגש קודש, ובניו יוסיפו אומץ, ובחוריו יעשו חיל בתורת ה', יתגדרו לפשט תורה בזה הגבול, אשר כבר נשכחה, ובזה יתקיים ויחזק אומץ. כה דרך ישראל מיום היותו מתנודד - פוק חזי אמירות דברים בספר אור זרוע סוף הלכות תפילה בתשובה מר"א מביהם ז"ל מעמד האומה בארצות פר"א, יעויין שם!
וזה "לא מאסתים" - מיאוס הוא על שפלות האומה בתורה והשכלה הרוחנית המופעת מתורתנו הכתובה והמסורה. "לא געלתים" - הוא על גיעול ופליטה ממקום למקום. "לכלותם" - הוא על הגלות שזה גיעול וכליון חרוץ להאומה. "להפר בריתי אתם" - הוא על שכחות התורה. רק "כי אני ה' א - לקיכם", רצונו לומר, שהגיעול והמיאוס הוא סיבה שאני ה' א - לקיהם. אבל לא מיאוס וגיעול מוחלטת "לכלותם ולהפר בריתי אתם" חלילה. שעל ידי זה יתגדל שמו ויתקיים גוי זרע אברהם, זרע אמונים, ראוי ועומד לקבל המטרה האלקית, אשר יקרא ה' לנו באחרית הימים בהיות ישראל גוי אחד בארץ, והיה ה' אחד ושמו אחד. ויש לנו בזה דברים רבים ואכמ"ל.
וזה לדעתי ביאור הגמרא ריש פסחים: וכאור בוקר בעולם הזה יזרח שמש לצדיקים לעתיד לבא, אשר רש"י ור"ת נדחקו בה. ולפי זה כך פירושה, דכמו דאילת השחר שהוא קופץ כאיל, ומרגע לרגע יפול אור יותר בהיר ויש הוספה בהאור, כן יזרח שמש לצדיקים לעתיד לבא. שזריחת השמש בעולם הזה על אופן אחד, מה שאין כן לעתיד לבא יהיה תמיד הופעה חדשה והשגות גדולות מרגע לרגע, במה שידעון מה שלא ידעו בידיעת השי"ת. ויתוסף להם הוספה והארה בכבודו יתברך מעת לעת, וכמו שאמר (תהלים פד, ח) "ילכו מחיל אל חיל", שלא יהיה לתלמיד חכם מנוחה בעולם הבא, כך שיהיו רצים בהשגה ובהארת אור א - לקי בלי הפסק. ובזה הפרט יהיה כאור בוקר, שהדמיון הוא בהוספת האור ומרוצתו המתגדלת מרגע לרגע ואינו עומד על תכונה אחת. בינה זה!

 

 

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