Mes fêtes ou vos fêtes ?

Cycle : la paracha selon le Sforno*  

Sforno 1

Mes fêtes ou vos fêtes ?

 

La parasha de Emor réunit un grand nombre de sujets, certains semblant a priori sans lien aucun.

Après avoir traité de l’interdiction faite aux cohanim de se rendre impurs et de certaines lois ayant trait aux sacrifices, la Tora débute un long passage relatif aux fêtes de l’année.

On aurait pu penser que le lien entre le service des cohanim et les lois des sacrifices avec les fêtes était précisément que lors des fêtes sont offerts des sacrifices particuliers, les moussafim, se rajoutant aux sacrifices perpétuels du matin et de l’après-midi, mais rien n’est moins sûr. En effet, les seuls sacrifices des fêtes dont il est question ici sont ceux de ‘hol ha-mo’ed. C’est ce qu’explique très clairement le Sforno (23:8) en nous disant « que l’intention n’est pas de décrire les moussafim de ‘hol ha-mo’ed puisque les moussafim des jours de fêtes eux-mêmes ne sont pas abordés, ni celui de Shabbat, ni celui de Shavou’ot [qui n’a pas de ‘hol ha-mo’ed] ni celui de Kippour. »

Alors dans quelle intention vient la description des moussafim de ‘hol ha-mo’ed ? Pour nous enseigner que ces jours ne sont pas des jours purement profanes et qu’ils font intégralement partie de la fête, même si certains travaux y sont permis.

C’est donc ailleurs qu’il faut chercher le lien entre les lois du culte et celles des fêtes.

Pour le Sforno, c’est que la finalité des sacrifices et celle des fêtes est une : il s’agit de faire résider la Shekhina, la présence divine, au sein du peuple d’Israël (23:2).

L’idée des sacrifices semble claire, celle de faire une offrande à Dieu afin d’obtenir son agrément, son pardon ou tout simplement de le célébrer. Dans le tous les cas, il s’agit de « travailler » sur la relation entre l’homme et Dieu et par là même de rendre concrète la présence de Dieu au sein d’Israël.

Dans le cas des fêtes, le vecteur de lien entre l’homme et Dieu n’est plus un élément extérieur à lui mais sa personne même. En effet, lors des fêtes, « en s’astreignant au repos total ou partiel, l’homme se sépare des activités profanes afin de se consacrer tout entier à la Tora et aux choses saintes ».

Et d’ailleurs le texte dit : « Les fêtes de Dieu que vous déclarerez convocation de sainteté, celles-là seront Mes fêtes » (Vayikra 3:2), c’est-à-dire selon les mots du Sforno « les fêtes que je désire ». Et ici, le Sforno met en résonance le verset de la Tora avec celui du prophète : « Mais s’il s’agit seulement de célébrations profanes, de préoccupation passagères, de plaisirs humains, ce ne sera pas “Mes fêtes” mais uniquement “Vos fêtes”, suivant le verset “Vos fêtes, mon âme les tient en horreur” (Isaïe 1:14). »

Alors, “Mes” fêtes ou “vos” fêtes ? A nous d’en décider.

 

Emmanuel Ifrah – 05/2018

 

*Rav 'Ovadiah Sforno, Italie 1480-1550

Texte original :

ספורנו ויקרא פרק כג פסוק ב


(ב) מועדי ה' אשר תקראו אותם מקראי קדש. אחר שדבר בענין הקרבנות ומקריביהם שהכונה בהם השרות השכינה בישראל כאמרו עולת תמיד לדורותיכם פתח אהל מועד לפני ה' אשר אועד לכם שמה (שמות כט, מב) דבר במועדים אשר בשביתתם יכוין לשבות ממעשה הדיוט בקצתם לגמרי כענין בשבת ויום הכפורים ולעסוק בכולם בתורה ועסקי קדש, כאמרו ששת ימים תעבוד וכו' ויום השביעי שבת לה' אלהיך (שם כ, ט - י) שתשבות ממלאכתך ויהיה עסקך כולו לה' אלהיך ובקצתם תהיה השביתה ממלאכת עבודה בלבד כמו שהוא הענין בשאר המועדים והכונה בהם שעם שמחת היום שישמח ישראל בעושיו יהיה העסק בקצתו בעסקי קדש כאמרם ז"ל יום טוב חציו לה' וחציו לכם (פסחים סח ב) ובזה תשרה שכינה על ישראל בלי ספק כאמרו אלהים נצב בעדת אל אמר אותם מועדים שתקראו אותם מקראי קדש פירוש אסיפות עם לעסקי קדש כי אסיפת העם תקרא מקרא כמו חדש ושבת קרוא מקרא (ישעיהו א, יג) וכן על מכון הר ציון ועל מקראיה (שם ד, ה):
אלה הם מועדי. הם אותם המועדים שארצה בם אמנם כשלא תקראו אותם מקראי קדש אבל יהיו מקראי חול ועסק בחיי שעה ותענוגות בני האדם בלבד לא יהיו מועדי אבל יהיו מועדיכם שנאה נפשי (שם א, יד):

 

 

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